La dégradation de la note souveraine du Japon n’inquiète guère l … – Le Monde

La dégradation de la note souveraine du Japon n’inquiète guère l … – Le Monde

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Par Philippe Mesmer (Tokyo, correspondance)

Malgré la décision de Standard & Poor's, la Bourse de Tokyo a ouvert en hausse de 1 %, le 17 septembre 2015.

A l’instar des agences de notation Moody’s et Fitch il y a quelques mois, Standard & Poor’s (S&P) a dégradé, mercredi 16 septembre, d’un cran la note souveraine du Japon. Le pays voit ainsi son appréciation rétrogradée de AA – à A +, une note assortie d’une perspective stable. S’il s’agit du premier abaissement par S&P de la note du Japon depuis janvier 2011, cette décision n’inquiète pourtant pas le gouvernement, qui table sur une hausse des impôts pour compenser des dépenses publiques qu’il n’est guère enclin à réduire.

  • Pourquoi Standard & Poor’s dégrade-t-elle la note du Japon ?

La décision de l’agence américaine illustre une défiance grandissante dans les « Abenomics », cette politique mêlant assouplissement monétaire, plans de relance et réformes structurelles menée par le gouvernement du premier ministre Shinzo Abe pour redresser la troisième économie mondiale.

« La possibilité de voir la reprise japonaise suffisamment forte pour restaurer le soutien de l’économie à la solvabilité du pays ne cesse de s’affaiblir, explique l’agence. Malgré les espoirs suscités au début, la stratégie de relance baptisée “Abenomics” ne devrait pas inverser cette tendance dans les deux ou trois prochaines années. »

Entre avril et juin, le PIB nippon a reculé de 1,2 % en glissement annuel. L’indice des prix reste proche de 0, loin de l’objectif de 2 % fixé par la Banque du Japon (BoJ), et la consommation ne s’améliore pas.

Le 15 septembre 2015, l’établissement central a décidé de maintenir la politique monétaire actuelle, considérant que l’économie « continue de se redresser modérément ». Il a toutefois admis l’impact du ralentissement des économies émergentes sur les exportations et les importations et n’exclut pas de nouvelles mesures pour soutenir l’activité.

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  • Quel est l’état de l’économie japonaise ?

La gestion des finances publiques du gouvernement japonais n’a guère de quoi rassurer les agences de notation. La dette japonaise pourrait atteindre 247 % du PIB en 2016 selon les calculs du Fonds monétaire international (FMI). Les requêtes budgétaires pour l’exercice 2016, commençant le 1er avril, atteignent le niveau record de 102 400 milliards de yens (750 milliards d’euros). Et si les arbitrages ne sont pas connus, d’importantes élections sénatoriales sont prévues en juillet 2016. Il y a donc peu de chances que le gouvernement s’engage dans une baisse des dépenses publiques. En 2015, le déficit budgétaire était de 7,7 %.

Les annonces formulées par le gouvernement en juin pour améliorer l’état des finances publiques – un mois après l’appel du FMI à des « actions drastiques » sur ce point – n’ont pas convaincu. Toujours déterminé à atteindre l’équilibre de la balance primaire (c’est-à-dire hors service de la dette) d’ici à l’exercice 2020, le gouvernement exclut néanmoins des baisses importantes des dépenses.

Pour cause : il table sur les rentrées fiscales en hausse grâce à une croissance nominale à 3 % en moyenne au cours des cinq prochaines années. Une augmentation de 8 à 10 % de la TVA en avril 2017 devrait également y contribuer. Or la précédente hausse de la TVA, de 5 à 8 % en avril 2014, avait plongé l’archipel dans la récession, et les réformes structurelles – la troisième « flèche » des « Abenomics » après la politique monétaire et les plans de relance – se font toujours attendre.

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Dans le même temps, le vieillissement de la population et le lent recul des salaires font que les Japonais commencent à puiser dans leurs réserves. Le taux d’épargne a pour la première fois reculé de 1,3 % à l’exercice 2013 clos fin mars 2014.

  • Quelles seront les conséquences de cette dégradation ?

A court terme, la décision de S&P ne devrait pas poser de problèmes. Fitch Ratings a baissé en avril la note du Japon, tandis que Moody’s l’avait fait en décembre 2014 : le « triple A » acquis par l’archipel en 1971 appartient désormais à un lointain passé.

Depuis 1998, date du premier abaissement de sa note, les dégradations successives n’ont jamais suscité de panique ni d’effondrement du marché ou de la monnaie. Et l’archipel n’a pas de problème pour emprunter, du moins pour l’instant. Le taux sur les emprunts à 10 ans ne dépassait pas 0,367 % le 16 septembre 2015. L’indice Nikkei a commencé la séance du 17 en hausse de plus de 1 %.

Il faut dire que la dette nippone est détenue à plus de 90 % par les Japonais eux-mêmes. Outre la BoJ et son programme massif d’acquisition d’actifs, les grandes banques et la poste japonaise financent l’achat des bons en puisant dans l’importante épargne de la population, dont le montant s’élève toujours à près de 1 400 000 milliards de yens (10 315 milliards d’euros), plus de deux fois et demi le PIB. Le Japon dispose également d’importantes réserves de change, à 1 244 milliards de dollars (1 100 milliards d’euros) fin août.

Mais les capacités d’emprunt locales pourraient se tarir vers 2020. Le Japon devrait ensuite recourir aux investisseurs étrangers, ce qui pourrait l’exposer à des pressions similaires à celles qui ont provoqué la crise grecque.

Article Source : economie japon – Google Actualités
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