Comprendre la mythologie japonaise en quatre clés

Des mangas aux jeux vidéo, en passant par les animations des studios Ghibli ou les arts martiaux, la culture nippone a largement infusé à l’intérieur de nos sociétés occidentales. Les grands mythes japonais, qui en constituent la matrice, restent pourtant largement méconnus. Et pour cause : « Il n’existe pas à ce jour de bonne traduction française des corpus de textes qui les rassemblent », souligne Alain Rocher, spécialiste des religions et traditions populaires du Japon, qui en offre un panorama exceptionnel dans « Les 100 Légendes de la mythologie japonaise » (« Que sais-je ? », PUF, 128 pages, 9 euros).

Plus étonnant, la plupart de ces légendes sont ignorées des Japonais eux-mêmes. « Leur histoire et leur influence ne sont pas comparables à celles de la mythologie gréco-romaine et de la Bible en Europe. Ils n’ont pas été aussi étudiés, enseignés ou réinterprétés en tant que tels dans des œuvres de fiction, et n’ont donc pas autant servi de matrice à tout un imaginaire collectif. » Ponctuellement, des groupes politiques ou religieux ont valorisé certains mythes pour forger les contours d’une identité culturelle. Mais ces tentatives ont généralement échoué à fonder l’équivalent d’un roman national.

Les sources de la mythologie japonaise

Les récits de mythologie japonaise parvenus jusqu’à nous se fondent sur deux grandes compilations de textes, constituées à la demande du pouvoir impérial au début du VIIIe siècle – époque de forte centralisation politique et administrative.

Le Kojiki, ou « Mémorial des faits anciens », est présenté à la Cour en 712 et fixe un récit univoque de l’origine du monde, de la fondation du pays, de l’installation des divinités sur Terre et de l’histoire des premières dynasties légendaires. Il s’achève sur la mort – historiquement réelle – de l’impératrice Suiko en 628.

Ces légendes racontent comment sont apparus la Terre, l’humanité et, bien sûr, le Japon

La seconde compilation, le Nihon shoki, ou Annales du Japon, est présentée en 720. Beaucoup plus volumineuse que le Kojiki, elle a notamment pour originalité de présenter, à côté de la version principale d’un mythe, toute une palette de variantes anciennes. Ces récits ont ainsi vocation à expliquer l’histoire du pays tout en légitimant « l’enracinement géographique et les prérogatives des grands clans (uji) par les gestes fondateurs de leurs divins ancêtres, écrit Alain Rocher. Le discours de l’empire naissant, loin d’effacer ces traditions, ne fait que les absorber pour les “mettre au pas” et les recycler à son profit : la famille impériale devient ainsi le clan des clans, ses traditions propres s’imposent comme la légende des légendes ».

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Source : Le Monde.fr

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