En refondant sa gouvernance, Nissan montre sa volonté d’apaisement à l’égard de Renault

Le groupe japonais accepte de faire entrer Thierry Bolloré à son conseil d’administration et nomme en numéro 2 un chaud partisan de l’alliance entre les constructeurs.

Par Philippe Mesmer et Éric Béziat Publié aujourd’hui à 10h00, mis à jour à 13h00

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De gauche à droite, Thierry Bolloré, directeur général de Renault, Jean-Dominique Senard, président du constructeur français, Hiroto Saikawa, PDG de Nissan, et Osamu Masuko, patron de Mitsubishi,  le 12 mars 2019 à Yokohama. KIM KYUNG HOON / REUTERS

Un grand ménage ! En quelques jours, Nissan qui doit faire face à une crise inédite depuis le 19 novembre 2018 et l’arrestation de son ex-président, Carlos Ghosn, pour malversations financières, a revu en profondeur sa gouvernance et ses organes de direction. Dernier mouvement en date : le constructeur japonais – partenaire de Renault et Mitsubishi au sein de la première alliance automobile mondiale – a procédé vendredi 17 mai à un vaste remaniement de son conseil d’administration (CA), qui passe de huit à onze membres (dont sept indépendants) et dans lequel le directeur général de Renault, Thierry Bolloré, fait son entrée.

Ce big bang du CA était attendu : quatre administrateurs le quittent, dont les anciens de Renault, Jean-Baptiste Duzan et Bernard Rey ; sept nouveaux y arrivent. Les présumées malversations de M. Ghosn avaient décidé Nissan de se doter d’un conseil plus fort et plus indépendant comprenant trois comités traitant des rémunérations, de l’audit et des nominations. Ce qui est plus surprenant en revanche, c’est que Nissan ait accepté l’arrivée de Thierry Bolloré au sein même de son organe central de gouvernance.

Cette nomination est d’évidence une concession faite à Renault (qui est aussi le premier actionnaire de Nissan avec 43,3 % du capital) dans le but d’apaiser des tensions entre les constructeurs français et japonais qui avaient culminé après l’arrestation de M. Ghosn, puis rebondi fin avril. A ce moment-là, le nouveau président de Renault, Jean-Dominique Senard, avait relancé l’idée d’une fusion à 50-50, projet que le patron de Nissan, Hiroto Saikawa, n’avait pas voulu examiner, le jugeant prématuré et contraire aux intérêts du constructeur nippon.

Hiroto Saikawa affaibli

Mais M. Saikawa est désormais affaibli par la dégradation des résultats financiers de Nissan qui devrait réaliser en 2019 son pire exercice depuis dix ans. L’ancien homme de confiance de Carlos Ghosn a même été sous la menace d’un limogeage ces jours derniers. Aura-t-il troqué un siège pour Thierry Bolloré contre à la fois son maintien à la tête de Nissan et un report de la fusion avec Renault ?

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Ce qui est certain, c’est que les récentes décisions ont été prises dans un climat de fièvre. Mme Keiko Ihara, ex-pilote de course et membre du conseil d’administration de Nissan, a reconnu qu’il y avait eu « un débat très animé » à propos du maintien de Hiroto Saikawa. Quant à la nomination de Thierry Bolloré, elle a, selon nos informations, provoqué des discussions tendues. Côté japonais, beaucoup reprochent encore à M. Bolloré son traitement de la crise au moment de l’arrestation de M. Ghosn, et en particulier son refus de parler à Nissan. Les mêmes n’auraient pas apprécié que M. Senard insiste en présentant cette nomination comme une obligation contractuelle pour Nissan.

Source Le Monde.fr

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