Sur un marché japonais de Sapporo (Hokkaido), le 15 mai.

« Mes parents ont connu la période de la bulle spéculative des années 1980 et croyaient que le gouvernement leur faciliterait la vie. Nous, nous devons épargner le plus possible et ne pas prendre le moindre risque. » Elevé dans la période qui a suivi l’éclatement de cette bulle, au début des années 1990, qualifiée de « décennie perdue » car caractérisée par une croissance quasi nulle, ce jeune Japonais, contractuel dans le secteur des médias, qui préfère rester anonyme, témoigne du manque de confiance dans l’avenir qui touche sa génération, inquiète quant à sa capacité à évoluer, à voir son pouvoir d’achat progresser, à bénéficier d’une retraite décente…

Article réservé à nos abonnés Lire aussi Inflation négative, croissance en berne, endettement… en zone euro, le spectre d’une spirale à la japonaise

Sur le point de quitter son poste, le 16 septembre, après près de huit ans de pouvoir, le premier ministre, Shinzo Abe, n’a pas, comme ses prédécesseurs, réussi à contrecarrer les craintes pour le futur des Japonais, à mesure que la troisième économie mondiale s’enfonçait dans la déflation, la baisse des prix amorcée dès 1996. Alors que le chômage augmentait et atteignait 5,5 % (un record pour le pays) au cœur des années 2000, les Japonais, surtout les jeunes, ont commencé à avoir peur pour leur avenir et ont cédé à la frugalité. Depuis 2000, les ventes annuelles de voitures ont reculé de près de 20 %, les voyages à l’étranger des 20-30 ans, de 30 %.

Spirale déflationniste

Dans ce contexte, des services et des enseignes bon marché, comme Uniqlo ou Shimamura dans l’habillement, se sont multipliés. Les magasins à 100 yens (80 centimes d’euros) ont pullulé, et les chaînes de restauration se sont lancées dans une course aux plats les moins chers. Tablant sur de nouvelles baisses des prix, les consommateurs repoussent leurs achats, alimentant cette spirale déflationniste. Une tendance accentuée par le vieillissement – les personnes âgées dépensant moins et coûtant plus cher à la société – et la contraction de la population amorcée à la fin des années 2000.

« En dix ans, mon pouvoir d’achat n’a quasiment pas progressé »

Dès son retour au pouvoir, en 2012, Shinzo Abe, et le gouverneur de la Banque du Japon (BoJ), Haruhiko Kuroda, ont voulu sortir le pays de ce qu’ils ont appelé « l’état d’esprit déflationniste ». Le gouvernement multiplie alors les plans de relance et M. Kuroda mise sur des mesures inédites d’assouplissement monétaire – allant jusqu’à fixer un taux directeur négatif. Objectif : créer un cycle vertueux de croissance alimentée par la consommation.

Il vous reste 48.87% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source : Le Monde.fr

Partagez !

Laisser un commentaire