LETTRE D’HIROSHIMA

Au sanctuaire Meiji, à Tokyo le 1er mai 2019. Au sanctuaire Meiji, à Tokyo le 1er mai 2019.

Pour Hiroshima, le sommet du G7 organisé du 19 au 21 mai n’est pas qu’une rencontre de dirigeants du monde cloîtrés entre les murs de l’hôtel Prince au bout de l’île d’Ujina. C’est aussi l’occasion de mettre en avant les trésors culinaires du département éponyme du sud-ouest du Japon, à commencer par ses sakés. Il n’est pas le premier producteur de saké au Japon, ce titre revenant à Niigata dans le nord de l’archipel. Mais il abrite un terroir particulier et reste un bastion d’innovations qui ont notamment permis l’avènement du plus apprécié des sakés : le ginjo (réalisé avec du riz poli à au moins 60 %). Et il veut le faire savoir.

La grande maison Sempuku a ainsi sorti une cuvée spéciale – un saké doux, facile à boire, de préférence frais, étiqueté G7 – qui pourrait figurer au menu des dégustations des chefs d’Etat présents. « Nous croisons les doigts », avoue Kiyotsugu Miyake, sixième du nom, le dynamique et volubile dirigeant de la maison de saké perchée sur les hauteurs de Kure, le grand port militaire à une vingtaine de kilomètres au sud d’Hiroshima.

Sempuku a une production annuelle d’environ 1,4 million de litres de sakés divers, du « futsushu », le saké ordinaire, au « junmai daiginjo », le plus raffiné. La maison fondée en 1856 a profité de l’activité de la marine militaire et de son arsenal aménagé à la fin du XIXe siècle. « En 1920, notre saké “Kuretsuru” a été embarqué sur le croiseur Asama. Après 220 jours de mer, par l’Afrique du Sud et l’Amérique latine, il ne s’était pas altéré. Il est devenu le saké officiel des bases navales », explique M. Miyake, intarissable sur une entreprise familiale ayant par ailleurs dû surmonter les bombardements américains de 1945 et le séisme de 2001 qui a détruit une partie de ses locaux.

Sempuku figure ainsi parmi les principaux « kura » (surnom donné aux producteurs de saké) d’Hiroshima, qui se retrouvent à Kure mais aussi dans la ville d’Higashi-Hiroshima, où huit maisons de l’association Saijo maintiennent leur activité dans un quartier au charme d’autrefois, avec ses bâtiments aux murs blancs soulignés de bois sombres et couverts de tuiles noirs, surmontés de cheminées de briques rouges.

Erosion des ventes

Ces grosses sociétés voisinent des petits producteurs comme Morikawa. La maison au fonctionnement encore artisanal produit 45 000 litres par an dans ses locaux ornés d’un agréable jardin japonais, installés à l’entrée d’un hameau au cœur d’une une vaste plaine de rizières. Ici, le saké est « plutôt léger, idéal pour accompagner un repas », explique Tomonori Morikawa, dirigeant de la maison familiale. Cela est dû à l’eau qui s’écoule du mont Noro qui domine la vallée. « Elle est très douce, sans calcium ni magnésium et avec très peu de fer. Elle manque un peu de minéraux pour nourrir les champignons, mais nous avons une méthode spéciale pour compenser », explique Motoharu Morikawa, responsable de la « sakéification » – deux fermentations avec ajout de champignons et de levures.

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Source : Le Monde.fr

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