Le président du comité d’organisation des Jeux olympiques de Tokyo, Yoshiro Mori, au siège du Parti libéral-démocrate à Tokyo, le 2 février. Le président du comité d’organisation des Jeux olympiques de Tokyo, Yoshiro Mori, au siège du Parti libéral-démocrate à Tokyo, le 2 février.

LETTRE DE TOKYO

Sous le feu des critiques suscitées par ses propos sexistes, le président du comité d’organisation des Jeux olympiques de Tokyo, Yoshiro Mori, devait annoncer vendredi 12 février qu’il démissionnait de ses fonctions. Selon cet ancien premier ministre (2000-2001), les interventions qu’il jugeait interminables des femmes au cours de réunions des instances sportives retarderaient les débats. Cette sortie avait provoqué l’indignation tant à l’étranger qu’au Japon, où circulaient des pétitions et s’organisaient des manifestations. La polémique avait pris de telles proportions que les annonceurs aux JO commençaient à songer à réduire la voilure – moins sans doute par conviction que pour ne pas compromettre leur image.

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Evolution de l’opinion

Les propos sexistes de M. Mori ne relèvent pas du simple dérapage verbal d’un octogénaire déphasé par rapport à son époque. Les gérontes du monde politique sont coutumiers de commentaires témoignant d’un machisme enraciné. Le vice-premier ministre et ministre des finances, Taro Aso (lui aussi octogénaire) n’est pas avare en remarques de la même veine : il y a deux ans, il mettait ainsi sur le compte des Japonaises la chute de la natalité dans l’Archipel. Selon Yayo Okano, politologue et professeure à l’université Doshisha, « M. Mori n’a fait que jeter du sel sur plaie ouverte ».

Les commentaires à caractère sexiste de dirigeants politiques, fussent-ils anodins en apparence et souvent proférés sur le ton de la plaisanterie mais répercutés avec complaisance par les médias, ne sont en rien des « gaffes » mais plutôt le symptôme de la persistance d’un état d’esprit qui entretient, sinon renforce, une discrimination à l’égard des femmes. En dépit de la poudre aux yeux lancée en 2014 par le précédent premier ministre, Shinzo Abe, promettant de « faire briller les femmes », le Japon demeure six ans plus tard au 121e rang (sur 153 pays) en matière d’égalité hommes-femmes selon le Forum économique mondial.

Les réactions aux propos de M. Mori témoignent de l’évolution de l’opinion. C’est la première fois qu’un tel poids lourd du parti libéral démocrate au pouvoir est contraint à démissionner pour des remarques sexistes. Ce changement dans les mentalités tardait à se transformer en une mobilisation citoyenne dépassant l’indignation afin de faire reculer le seuil de tolérance à ces « maladresses ». « La même chose se reproduira si vous n’admettez pas vos préjugés et ne prenez pas de mesures pour y remédier », avait tweeté la footballeuse Shiho Shimoyamada, première sportive professionnelle ouvertement lesbienne, au lendemain des déclarations de M. Mori, pour sa part, discrètement mais avec un bel ensemble par ses paires.

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Source : Le Monde.fr

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