Dans un restaurant de Tokyo, le 22 juin.

A l’heure de la levée à travers le monde des mesures exceptionnelles prises pour combattre la contamination par le Covid-19, le Japon fait figure d’exception parmi les pays membres du G7 avec plus de 18 000 contaminations et 971 morts, soit 7 décès par million d’habitants (400 pour un million en France).

Un bilan d’autant plus remarquable que les mesures prises au cours des sept semaines d’état d’urgence n’ont été ni coercitives (selon la loi, le gouvernement ne peut restreindre la liberté de mouvement de la population) ni intrusives (traçage des personnes ayant été en contact avec des porteurs du virus) alors que l’archipel est a priori vulnérable en raison de la proportion élevée des personnes âgées, de mégalopoles surpeuplées et de transports urbains surchargés.

En levant l’état d’urgence, le 25 mai, le premier ministre, Shinzo Abe, s’est félicité du « succès » du Japon dans la lutte contre le virus. Il n’a pas convaincu : selon un sondage de l’agence Jiji press, 61,3 % des Japonais désapprouvent sa politique pour faire face à la pandémie.

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Impératif des JO

Les gouvernements japonais n’ont jamais brillé par la rapidité et la transparence de leur réponse à des situations d’urgence en raison de la pesanteur bureaucratique et de l’absence de leadership politique. Cette fois, plus que l’indécision, c’est un impératif obsessionnel qui a conduit aux atermoiements du gouvernement : maintenir les Jeux olympiques de Tokyo qui devaient débuter fin juillet. Puisque les JO restaient programmés, l’opinion a longtemps pensé que cette pandémie était un « incendie sur l’autre rive de la rivière ».

Lors de l’apparition du virus en janvier, le gouvernement n’avait pas jugé bon d’interdire l’entrée de l’archipel aux touristes chinois pour ne pas froisser Pékin ni pénaliser l’économie. Après la fermeture des écoles fin février – mesure qui suscita de fortes perturbations –, il n’a véritablement réagi que fin mars à la suite du report des JO sous la pression du Comité olympique international. Soudain, le Japon se « découvrait » menacé et les autorités appelaient à porter des masques, à éviter les lieux publics, à respecter une distanciation physique et à recourir au télétravail et fermaient les frontières aux non-Japonais ayant séjourné dans des pays fortement contaminés – c’est-à-dire au reste du monde.

La faillite de l’exécutif à prendre la mesure de la menace – qui dans le cas d’espèce n’est pas propre au Japon – incite à chercher ailleurs les raisons du bilan de l’archipel dans la lutte contre le coronavirus. Au-delà des questions scientifiques aujourd’hui sans réponses – vigueur de la souche du virus au Japon, facteurs génétiques au niveau des antigènes –, ce bilan tient en grande partie à des facteurs qui ont contribué, en amont, à éviter la propagation exponentielle du virus qu’ont connue l’Europe et les Etats-Unis.

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Source : Le Monde.fr

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