#metoo : Face au mouvement, les résistances persistent au Japon et en Corée du Sud

Des manifestantes lors d’un rassemblement appelé « Flower Demo » pour critiquer les récents acquittements dans des affaires de viols présumés au Japon et demander la révision de la loi contre les crimes sexuels, devant la gare de Tokyo, le 11 juin 2019. Des manifestantes lors d’un rassemblement appelé « Flower Demo » pour critiquer les récents acquittements dans des affaires de viols présumés au Japon et demander la révision de la loi contre les crimes sexuels, devant la gare de Tokyo, le 11 juin 2019.

Sans manifestations massives ni prises de position spectaculaires, et malgré les résistances d’un pouvoir dominé par les conservateurs, le mouvement #metoo a fait son chemin au Japon. En témoignent les excuses formulées, le 29 septembre, par le chef d’état-major des Forces d’autodéfense (FAD, l’armée nippone) pour l’agression de Rina Gonoi quand elle était militaire.

Après avoir dénoncé ses trois agresseurs, Mme Gonoi avait vu son affaire de harcèlement, survenue devant une dizaine de témoins, rejetée par le parquet début 2022, faute de preuves. L’ex-militaire a alors choisi de la médiatiser sur YouTube. « Je ne peux pas rester assise à penser aux femmes des FAD ayant subi la même chose », a-t-elle expliqué. L’initiative a convaincu 146 militaires de lui adresser leurs témoignages d’agressions.

Depuis les débuts de #metoo au Japon, les expositions publiques des agressions se sont multipliées et ont fini par faire bouger des institutions policière ou judiciaire jusque-là peu à l’écoute des victimes. La journaliste Shiori Ito a obtenu en 2022 la condamnation au civil de Noriyuki Yamaguchi, ancien journaliste de la chaîne TBS, pour avoir l’avoir violée en 2015 dans une chambre d’hôtel. En 2018, Junichi Fukuda, haut fonctionnaire du ministère des finances, a dû démissionner après que sa victime, journaliste de TV Asahi, a révélé avoir été harcelée dans la presse.

Frémissements

Mais ces cas ne sont que des frémissements dans un pays classé 116e sur 146 en matière d’égalités hommes-femmes en 2022 par le Forum économique mondial, et où la dénonciation publique n’est pas sans conséquence. En 2020, la politicienne Shoko Arai a été exclue du conseil municipal de Kusatsu (centre) pour avoir révélé que le maire, Nobutada Kuroiwa, l’avait agressée.

Les fortes résistances expliquent la mue de #metoo en #wetoo (« nous aussi »), qui se voulait mieux adapté à la société nippone en suscitant des manifestations de solidarité pour les victimes. L’évolution s’est accompagnée de mobilisations, comme celles du groupe Flower Demo, une association de femmes, qui manifeste régulièrement contre le harcèlement.

Lire aussi le récit (2021) : Article réservé à nos abonnés Pour les Japonaises, le plafond de verre reste « extrêmement bas »

Quelques rares avancées législatives ont accompagné le mouvement, notamment l’adoption en 2022 de lois sur le suivi des enseignants condamnés pour agression sexuelle et contre l’exploitation des jeunes adultes dans des contenus pornographiques. En revanche, la législation sur le viol reste très critiquée. Révisé en 2017 pour la première fois depuis 1907, le code pénal a porté de trois à cinq ans la peine minimale de prison pour de tels actes. Mais le texte continue d’exiger que les victimes prouvent leur incapacité à résister. En 2019, un homme est sorti libre du tribunal alors même qu’il avait été reconnu coupable d’avoir violé sa fille quand elle était adolescente. Sa victime n’avait pas pu prouver qu’elle avait fait tout son possible pour échapper aux viols.

Il vous reste 52.15% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Source : Le Monde.fr

Partagez !

Laisser un commentaire