Le premier ministre japonais Shinzo Abe, le 17 avril à Tokyo.
Le premier ministre japonais Shinzo Abe, le 17 avril à Tokyo. POOL / REUTERS

Un mouvement inédit de protestation sur Twitter et une forte mobilisation de l’opposition ont accueilli le projet du premier ministre japonais, Shinzo Abe, de reporter à 65 ans, contre 63 aujourd’hui, l’âge du départ à la retraite des procureurs. Le report à 68 ans serait même possible pour les dirigeants du parquet. « Il s’agit de tirer le meilleur parti des compétences et de l’expérience de ces fonctionnaires pour traiter des questions administratives, de plus en plus complexes et sophistiquées », s’est défendu M. Abe mardi 12 mai au Parlement. Il espère faire adopter un amendement législatif en ce sens en commission avant la fin de la semaine.

Le premier ministre répondait aux attaques de l’opposition, à commencer par celles du chef du Parti démocrate constitutionnel (PDC), Yukio Edano, qui voit dans le projet « une menace sur la séparation et l’indépendance des pouvoirs, le cabinet pouvant dès lors contrôler, de manière arbitraire, le personnel du parquet ».

Pour ses opposants, le texte vise avant tout à assurer l’avenir du procureur général de Tokyo, Hiromu Kurokawa, pressenti pour prendre la tête du parquet national. M. Kurokawa a eu 63 ans début février. A l’époque, le gouvernement lui avait accordé un sursis de six mois, une décision déjà critiquée.

« S’il vous plaît, ne détruisez pas ce pays »

Réputé proche de M. Abe et du puissant secrétaire général du gouvernement, Yoshihide Suga, M. Kurokawa serait, pour ses opposants, utile pour bloquer les enquêtes menaçant l’administration, notamment les affaires de favoritisme impliquant les entreprises du secteur éducatif, Moritomo et Kake Gakuen. Dirigées par des proches de M. Abe, les deux sociétés auraient bénéficié de passe-droits pour leurs projets. En février, le député du PDC, Hiranao Honda, avait qualifié le procureur de « gardien, représentant et videur du Kantei » (la résidence du premier ministre).

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Ces critiques de l’opposition qui s’expriment depuis trois mois sont pourtant sans commune mesure avec la mobilisation populaire contre le projet de loi, inédite au Japon. Sur Twitter, le mot-dièse « manifestation contre le projet de réforme du parquet » a été repris par plus de neuf millions d’utilisateurs. Fait notable dans un pays où le monde culturel tend à éviter les positionnements politiques, le mouvement implique nombre de stars, comme la chanteuse Kyoko Koizumi, l’acteur Tadanobu Asano ou encore l’auteure de manga Chika Umino. « Ne détournez pas la loi et la politique à votre profit. S’il vous plaît, ne détruisez pas ce pays », a imploré Arata Iura, acteur très présent dans les films d’Hirokazu Kore-eda.

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Source : Le Monde.fr

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